Capable

Publié le par Opale

"La juge et moi pensons que vous êtes capable d'assumer cette deuxième confrontation, vous vous exprimez bien, c'est malheureux à dire mais vous être une "bonne" victime contrairement à d'autres qui ne sont pas en état de parler, qui n'ont pas les capacités intellectuelles "

Je suis capable de quoi madame mon avocate ? Capable de ne pas me foutre en l'air après avoir approché à nouveau du coeur de sa folie ? Oui probablement.

Mais que savez-vous des heures et des jours d'après ? 

Que savez-vous, vous, la Juge, la Justice de ces journées d'enfer où se réveiller est une souffrance , où l'angoisse est là dès la première minute ?

Que savez-vous de tout ce discours gravé pendant des années et qui remonte et m'envahit dès que je l'entends parler et même dès que je le lis ?

Que savez-vous de mes larmes, de mes messages paniqués sur le répondeur de ma psychologue pour lui demander si je suis en train de devenir folle, pour lui dire que je ne veux pas qu'on m'enferme ?

Je suis une "bonne victime" ou une professionnelle de la dissociation pour l'avoir pratiqué pendant toutes ces années de torture ? 

Non vous ne m'avez pas vue pleurer lors de l'audition chez la Juge, non vous ne m'avez pas vue craquer, vous avez vu une victime qui parle des abus subis, qui regarde la Juge dans les yeux quand elle s'adresse à elle.

Vous ne voyez pas celle qui est en moi et qui en crève de maîtrise, vous ne voyez pas celle qui hurle en entendant ces mots sales, celle qui voudrait tout casser en vous entendant vous et la Juge parler d'un détail précis d'abus comme s'il s'agissait du dernier disque sorti la veille...

Je sais madame mon avocate que vous voulez aller au bout de cette affaire, que vous pensez bien faire, je sais que cet homme mérite la prison.

Mais qui suis-je pour la Justice , juste cet outil qui peut leur servir à peut-être, je dis bien peut-être aboutir à un procès qui peut-être l'amènera en prison.

Je vais devoir payer ce prix parce que je ne saurai pas résister à la pression que vous et la Juge faites peser sur mes épaules en me disant que si je ne vais pas à cette deuxième confrontation, le dossier tombera à l'eau.

La Juge était déçue me dites-vous...Entre nous je m'en fous madame mon avocate.

Moi je ne suis pas déçue non, je suis ravagée, ravagée à l'idée d'encore une fois le voir, d'encore une fois l'entendre et constater encore et toujours comme vous le savez qu'il va continuer de fanfaronner , de piétiner ma souffrance et de jouer avec délectation avec la Justice.

Que faut-il de plus ? J'ai déclaré des faits le 27 janvier 2011, je les ai confirmés devant lui en confrontation le 29 mai 2012, je les ai confirmés devant la Juge ce 17 septembre 2012.

Cela ne suffit pas juridiquement me dites-vous, mais combien de fois suffiront ? Combien de fois devrai-je confirmer ce qu'il m'a fait, pendant que lui s'amuse et jouit de toute sa perversité à voir tout le monde avoir de l'attention pour lui, peu importe la forme de cette attention ?

Vous savez ce que je déteste plus que tout au monde madame mon avocate ? C'est que l'on voie mes émotions, que l'on voie mes larmes, ma peur, c'est qu'on puisse s'apercevoir à quel point je voudrais me recroqueviller dans un coin au lieu de rester là, stoïque en entendant ces horreurs.

Vous vantez ces années de travail sur moi en thérapie, certes oui et pourtant je ne commence que seulement à oser laisser aller quelques émotions, à en avoir moins peur.

Et vous me dites madame mon avocate que ma présence est indispensable pour la Juge, que tout va reposer sur moi, vous me dites "vos réactions vont être observées tout au long de la confrontation"

Il y en a un autre madame mon avocate qui a passé 6 ans de sa vie à observer mes réactions...mes réactions à ses gestes pervers . C'est contre lui que j'ai porté plainte.

Alors sachez juste que tout ce dont j'ai envie encore une fois, c'est de me détruire pour vous montrer à quel point je ne veux pas subir cela à nouveau.

Non je ne suis pas "capable" , j'en crève de peur et de douleur à l'idée de le revoir, d'être encore aspirée par sa folie qui me dévaste.

Et pourtant, probablement que je vais devoir vous obéir à vous et à la juge pour céder à ce que je considère comme du chantage fait à une personne vulnérable.

Me donnez-vous le choix ? Si je n'y vais pas et que le dossier aboutit à un non-lieu sans procès, tout reposera sur ma responsabilité , sur mon refus.

Vous ne serez pas là madame mon avocate, ni vous ni la Juge, quand après l'avoir revu , je serai submergée par mes souvenirs et par sa folie, sa perversité qui m'engloutit encore et encore à chaque mot prononcé.

Lui sera là, dans ma tête, à me retourner le cerveau, car lui est "capable" madame mon avocate.

 

 

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Publié dans émotions en vrac...

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